Rouge Griotte
Télécharger en PDFLe marbre Rouge Griotte tire son appellation de la cerise du même nom, à la couleur rouge vif inimitable. Lorsque le marbre contient de nombreux goniatites (des coquillages fossilisés qui composent l'ensemble du marbre) remplies de calcite blanche, on l’appelle « œil de perdrix ».
Le rouge Griotte était un des marbres de prédilection des appartements royaux au XVIIIe siècle, notamment pour la réalisation de cheminées. Louis XIV, très friand de ce rouge particulier, fait concevoir dans ce marbre de nombreuses cheminées du Château de Versailles . Sans ornements, ne valant que par la couleur du marbre, on peut y admirer la cheminée du Cabinet Intérieur de Louis XV. Les autres sont généralement décorées de bronze doré, comme celles du Cabinet du Conseil, de la Garde-Robe de Louis XVI, du Cabinet Doré, de l’appartement de Madame Victoire, des petits appartement de Marie-Antoinette , etc.
Les plus grands palais s’en pourvoiront aussi : le Château de Fontainebleau conserve au moins deux cheminées anciennes réalisées dans ce même marbre. La première se trouve dans la Salle du Conseil et la seconde dans le Salon de l'Abdication. Les musées du Louvre et des Arts Décoratifs à Paris ne manquent pas d’exposer de telles cheminées, parfaitement représentatives du goût des XVIIe et XVIIIe siècles.
Au XIXe siècle, ce marbre est toujours extrêmement réputé et abondamment employé. L'Opéra Garnier de Paris, dans son époustouflante décoration, dote son Grand Foyer d’une cheminée monumentale taillée dans ce rouge imposant.
Largement utilisé dans la décoration d’objets tels que pendules et statuettes, ce prestigieux rouge a également vocation à décorer les façades d’architectures en complément d’autres marbres. Les palais, hôtels particuliers et églises l’ont utilisé, comme l’Hôtel de Cassini (1768), doté d’une salle à manger dont les dessus de portes sont en marbre griotte. Napoléon Bonaparte fait réaliser la frise de l’Arc de Triomphe du Carrousel (1809) dans un marbre griotte qui lui apporte une solennité admirable.
Les principales carrières se trouvent dans la région de Caunes-Minervois et Félines-Minervois au nord-est de Carcassonne. Exploitées dans l’Antiquité, elles sont redécouvertes vers 1615 par les sculpteurs italiens Stefano Sormano et Antoine Lignani, qui commenceront un échange des différents marbres de Caunes contre des marbres blancs de Carrare. Le célèbre sculpteur Bernin attire l’attention du Roi sur ces carrières, qui somme Claude-Félix Tarlé de les exploiter pour la Cour, puis les décrètes « carrières royales » en 1692. Le Rouge du Languedoc et le griotte sont alors les plus demandés, provenant du plateau de Terrables et de la Boriette, où l’on trouve également du Bleu Turquin . Il circule alors sous le nom erroné de « Griotte d'Italie ».
Le marbre Rouge Griotte a également été extrait en d'autres endroits comme à Sost près de Mauléon-Barousse, dans la carrière de Coumiac à Cessenon-sur-Orb et en Espagne près de Lezo et Renteria.
Largement exporté, les Etats-Unis ont particulièrement apprécié le raffinement de ce noble matériau.
Bibliographie
J. Dubarry de Lasalle, Identifying marbles, Ed. H. Vial, Dourdan, 2000
J. Dubarry de Lasalle, Using marbles, Ed. H. Vial, Dourdan, 2005
P. Julien, Marbres, From Quarries to Palaces, ed. Le Bec en l'air, Manosque, 2006
Marmi antichi, collective work, ed. De Luca, Rome, 1998