Style Japonisme / Ref.17284
Chef d'oeuvre d'Édouard LIEVRE (1829 – 1886), La table d'apparat de style japonisant du salon d'Edouard Detaille
Dimensions
Largeur 153cm
Hauteur 120cm
Profondeur : 82cm
Époque et provenance:
1877
Palissandre massif, bronze doré « vieux ton d'or », plateau en marbre Rouge Griotte du Nord.
Dimensions : H. 120 cm ; L. 153 cm ; P. 82 cm
Statut:
Signature « EL » sur les bronzes.
Provenance : Ancienne collection Édouard Detaille à Paris. Ancienne collection Roberto Polo
En 1877, Édouard Detaille commande plusieurs meubles luxueux à Édouard Lièvre afin d'aménager son hôtel particulier récemment construit au 129 boulevard Malesherbes, devenant ainsi son plus important mécène. Réalisée à cette occasion, cette exceptionnelle table d'apparat est un des joyaux du mobilier japonisant conçu par le célèbre dessinateur. En palissandre massif et richement orné, ce meuble inspiré d'une table à offrandes japonaise repose sur six pieds de bronze en forme de trompes d'éléphants dorés dans le « vieux ton or » caractéristique d’Édouard Lièvre. Cette table est décorée sur ces quatre faces et comporte une ceinture galbée garnie de bronzes ajourés représentant les initiales entrelacées d’Édouard Detaille, « ED », à la manière des kamon, ou blasons, japonais.
Plusieurs bronzes de cette table sont signés des initiales d’Édouard Lièvre, « EL », et numérotés.
Lièvre s’est d’abord fait connaître comme dessinateur de modèles pour une fonderie de la Meuse, puis s’installe à Paris où il s’établit comme dessinateur lithographe. Fin connaisseur des plus grandes collections publiques et privées, il participe à la publication de nombreux ouvrages ornés de ses gravures, afin de faire connaître les chefs d’œuvres des musées et contribuer ainsi à une meilleure connaissance des styles : cette activité le dote d’un sens aigu de l’observation et, stimulant son goût pour la création, lui permet, à partir des années 1870-1875, de réinterpréter ces sources d’inspirations dans son activité de créateur de meubles et d’objets d’art.De plus, la découverte des pays d'Extrême-Orient à l'occasion des Expositions Universelles, et plus particulièrement du Japon, permet à Lièvre d'appréhender un nouveau répertoire décoratif, plus épuré et minimaliste, dont cette table est un extraordinaire témoignage. Cette nouvelle conception du décor et des formes par Lièvre en fera un précurseur du modernisme au travers de ses œuvres japonisantes. Lièvre devient ainsi un créateur de grande renommée et conçoit plusieurs meubles exceptionnels pour les personnalités les plus en vue de son époque comme Sarah Bernhardt ou Louise-Emilie Valtesse de la Bigne, la plus riche courtisane de Paris, bien connue d’Édouard Detaille.
Cette table est l'exceptionnel et rarissime témoin du mobilier dessiné par Édouard Lièvre pour Édouard Detaille. Peintre d'Histoire avec une grande prédilection pour les scènes militaires, Detaille (1848-1912) fait rapidement fortune et fait appel aux créateurs les plus prestigieux pour décorer son intérieur. Les sommes considérables versées alors par Detaille à Lièvre prouvent la grande renommée dont celui-ci jouissait :
« Âgé de vingt-six ans et déjà fortuné, Detaille avait acquis, en 1875, un terrain situé au 129 boulevard Malesherbes afin d'y bâtir un hôtel particulier (…). Lièvre allait devenir son principal fournisseur. Une analyse attentive d'un album de photographies de Paul Gers, représentant l'intérieur de l'hôtel particulier de Detaille, témoigne qu'il a commandé à Lièvre des meubles fastueux, dans les styles les plus variés. Dans son journal, (…) Detaille a minutieusement noté les sommes réglées à Lièvre ; un premier paiement est effectué en septembre 1877, suivi par d'autres : 3.000 francs en novembre, 6.000 et 6.500 francs en décembre. Ces sommes sont bien plus importantes que celles réglées à Étienne Roudillon, Siegfried Bing, Auguste Godin et autres fournisseurs prestigieux, et témoignent de la réputation exceptionnelle de Lièvre. Le meuble le plus innovant dessiné par Lièvre pour Detaille est une grande console d'apparat inspirée d'une table d'offrandes japonaise, à quatre faces et six pieds en forme de trompes d'éléphants. »
Cette table d'apparat est une des œuvres emblématiques des Arts décoratifs : il s'agit d'un exceptionnel témoignage d'une commande privée réalisée par le plus grand créateur de meubles du XIXème siècle, Edouard Lièvre pour le salon de son mécène Edouard Detaille.
Bibliographie :
Succession Édouard Detaille. Première vente. Tableaux anciens et modernes. Objets d’Art et d’Ameublement. Vente après décès des 10 et 11 mars 1913, Hôtel Drouot, lot n° 204.
Édouard Lièvre, in Connaissance des Arts, Hors Série N° 228, reproduite p. 19.
« Édouard Lièvre, créateur des arts décoratifs du XIXè siècle », L'objet d'art, n° 394, septembre 2004, reproduite p. 104-105.
Roberto Polo : The Eye par Werner Adriaenssens et al., reproduite p. 224-227.
Cette table a été décrite par Roberto Polo dans L'objet d'art, n° 394, septembre 2004.
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