Style Louis-Philippe / Ref.15499

E. BRUN d’après Jules-Claude ZIEGLER, Portrait de Louis de Champagne, comte de Sancerre, 1920

Ce portrait du comte de Sancerre fut exécuté par E. Brun en 1920. Il s’agit d’une copie de l’œuvre de Jules-Claude Ziegler, conservée au château de Versailles, comme l’indique l’inscription placée en bas à gauche de la toile.

Le portrait original fut commandé pour la Galerie militaire de Versailles en 1834 ; à sa livraison, il se trouvait dans la salle des connétables. C’est sous le règne et l’impulsion de Louis-Philippe (1773-1830) que l’ancienne résidence des rois de France fut transformée en musée dédié « à toutes les gloires de la France ». Dans ce cadre, il fut passé commande de nombreuses œuvres destinées à illustrer le passé politique et militaire de la France, dont ce portrait.

La copie du portrait versaillais fut probablement commandée par la famille de Sancerre pour sa demeure personnelle, le château de Sancerre, où il se trouvait.

Le connétable et sa monture occupent le centre de la composition. Très digne, il tourne la tête vers sa gauche, comme si son attention y avait été attirée ; un moyen pour le peintre de dissimuler partiellement son strabisme, notifié dans la « chronique du religieux de Saint-Denis ». Il dirige son cheval de la main gauche, et il tient dans la droite un bâton qui témoigne de sa charge. Il porte armure et cotte de maille et, au-dessus, une grande cape rouge sur les épaules et une tunique jaune sur laquelle apparaissent les armes de sa famille. Le blason se trouve également sur la barde couvrant le haut du corps du cheval, où il est surmonté d’une couronne comtale. Le cheval est en marche, la queue au vent, conférant un certain mouvement au portrait. Il évolue dans un paysage rocheux s’étendant jusqu’à l’horizon. Le ciel est chargé de nuages en partie basse, d’abord gris sombre puis allant s’éclaircissant jusqu’à un ciel bleu dans le tiers supérieur de la toile.

La copie est rigoureusement identique à l’original, à deux exceptions près : l’absence de la signature de l’artiste sur le rocher, remplacée par l’inscription, et la présence d’un château à l’arrière-plan. Il s’agit probablement d’une demande expresse des commanditaires de notre tableau : puisque ce dernier était destiné à orner les murs du château de Sancerre, il semble adéquat de représenter la bâtisse comme étant une partie intégrante de l’histoire du comte.

Louis de Champagne, comte de Sancerre (1341/42-1402) était seigneur de Charenton, Beaumetz (ou Bommiers ?), Menetou-Salon puis d’Ambrault (1391). Ayant combattu à de nombreuses reprises lors de la guerre de Cent Ans, il fut nommé Maréchal de France en 1368 et brilla au combat en de nombreuses occasions. Le chroniqueur Jean Froissart (v. 1337-v. 1410) écrivit de lui qu’il était « vaillant homme et hardi chevalier durement », et « le plus bel ornement de la chevalerie française ». Il fut aussi ambassadeur d’Angleterre en 1385, gouverneur du Languedoc entre 1390 et 1401, et enfin connétable de France en 1397.

Le comte de Sancerre fut inhumé à la basilique de Saint-Denis, où se trouve aujourd’hui encore son gisant, premier portrait plus proche dans le temps de Louis de Champagne, dont Jules-Claude Ziegler s’inspira sans doute pour son portrait. Il est ici représenté en tant que connétable, titre désignant le chef souverain des armées du roi à partir de la fin du xii^e siècle, et en tant que seigneur de Sancerre, grâce à la représentation du château en arrière-plan et à celle de ses armoiries.

La représentation s’inscrit dans l’intérêt documentaire que porta le xix^e siècle à l’histoire de France, notamment dans la représentation de l’armure. Cette passion historique fut prolongée au xx^e siècle dans le cadre de la réalisation de la copie, qui se vit accompagnée d’un cadre dont l’ornementation reprend quelques moulures de choux frisés néogothiques.